C’est un des effets collatéraux du Covid-19. Depuis plusieurs semaines,  j’accueille de plus en plus de personnes souffrant de “fatigue pandémique”. Après des mois à serrer les dents, elles ont besoin de nommer les choses. Elles ont besoin de se lâcher. Elles ont besoin de partager leur lassitude, leur impuissance, leur frustration ou leur colère face à la situation actuelle. Elles voudraient à nouveau se projeter vers du positif, retrouver un sentiment d’allégresse .

En fait, c’est comme si c’était la vague de trop. Celle qui fait tout déborder. Et elle n’épargne personne. Même les thérapeutes (oui, nous sommes humains et capables d’émotions. Et donc oui, nous sommes frustré.e.s et lassé.e.s de cette situation). 

Cette vague est donc assurément plus contagieuse… y compris sur le plan psychique. On a d’ailleurs plus vite fait de compter les conversations où on ne parlera pas de la pandémie (faites le test pour voir) !

Et bien, le saviez-vous ? Ce  “sentiment de détresse” voire de “désespoir” marqué par du stress, de l’anxiété, des insomnies a un nom ! Il s’agit de la fatigue pandémique. 

Qu’est-ce que c’est ? Comment réussir à la surmonter ? Je donne quelques pistes dans cet article.

Un article garanti sans ARN messager mais sans poudre de licorne non plus. Parce que la santé mentale, c’est (malheureusement) complexe.

fatigue pandémique

La fatigue pandémique

C’est quoi ce syndrome ?

Confinements, couvre-feux, incertitudes face à l’avenir, peur de tomber malade… Tous ces paramètres incontrôlables créent une situation de stress qui pèse sur le moral. Notre patience est mise à rude épreuve et cela se fait ressentir : détresse, désespoir, stress, anxiété, insomnies… La fatigue pandémique s’installe dans notre quotidien.

Selon l’OMS (l’Organisation Mondiale de la Santé), la fatigue pandémique serait “une réponse naturelle et attendue face à une crise de santé publique prolongée” accentuée par les “mesures restrictives ayant un impact sans précédent sur la vie quotidienne de chacun”.

 La conséquence majeure de cette fatigue pandémique (au-delà de la surconsommation d’antidépresseurs, d’anxiolytiques et autres substances plus ou moins légales), c’est le relâchement des mesures sanitaires et la propagation du virus par négligence. 

Pour reformuler : “vous êtes fatigués de la situation sanitaire. Et plus elle s’étale dans le temps, plus vous avez envie de désobéir / arrêter d’être un bon élève (rayez la mention inutile)”. 

On en a gros !

En gros, on en a marre de faire attention à chaque geste barrière, à envisager l’autre comme porteur du virus, à calculer les distances de sécurité, à se badigeonner de gel hydroalcoolique. On est las du manque de vie sociale ou culturelle, de l’impossibilité de se projeter et de s’organiser ou encore de l’incertitude économique. Et donc, on se dit : “Pfff, allez, je peux me le permettre ce verre entre potes”. Et bam ! Vous vouliez une année 2022 plus positive ? Et bien elle l’est ! Mais au COVID.

Et attention, une fatigue peut en cacher une autre. Il y a cette fatigue pandémique accentuée et envenimée par la crise sanitaire que nous traversons. Et il y a la fatigue inhérente à la période de l’année : le froid hivernal s’installe, la lumière du jour est éphémère, la charge de travail est plus abondante et peut être source d’anxiété.

On pourrait logiquement penser que la dépression saisonnière joue un rôle dans l’augmentation de ces chiffres, mais c’est bien la fatigue pandémique qui est principalement mise en cause par l’enquête CoviPrev

fatigue pandémique
Si on leur demandait, les chats nous diraient qu’ils souffrent eux aussi de fatigue pandémique. Cela fait quand même deux ans que l’on squatte chez eux…

Fatigue pandémique : quelles conséquences ?

Le résultat de ce combo magique ? La fatigue et la perte de repères sur de nombreux pans de nos vies entretiennent un épuisement qui se matérialise par différents symptômes, variables d’une personne à l’autre :

  • anxiété, 
  • stress, 
  • dépression, 
  • troubles du sommeil, 
  • dérégulation émotionnelle (diminution des émotions positives et augmentations des émotions négatives), 
  • sentiment de détresse prolongé, 
  • difficulté à se concentrer, 
  • émergence ou renfoncement d’états traumatiques ou de comportements addictifs,
  • etc. 

Pour illustrer ce bilan, on remarque depuis septembre 2020 une multiplication par deux des états dépressifs. Hourra ? Ce phénomène ne touche pas uniquement la France.

La lassitude liée au covid, ça touche qui ?

D’après de récentes études, les premiers concernés par cette fatigue pandémique seraient:

  • Les étudiants, se sont eux qui vivent ces restrictions de liberté de façon la plus frustrante.
  • Les inactifs ou personnes âgées qui se retrouvent isolées de leur famille et en manque de soutien social.
  • Les personnes étant dans une situation précaire d’un point de vue économique.
  • Les personnes ayant des antécédents de troubles psychologiques se trouvent aussi plus fragilisées face à la pandémie.

A noter que les femmes sont deux fois plus touchées que les hommes par le phénomène. Cela s’explique par le fait que la charge mentale est décuplée par le confinement et le télétravail, ainsi que par la hausse des violences conjugales.

Pour résumer, si vous étiez vulnérables avant la crise, votre situation n’a certainement pas dû s’arranger ces deux dernières années.

L’accumulation de ces symptômes n’est donc pas à prendre à la légère. Un sentiment de grande détresse peut s’installer et devenir dangereux.

fatigue pandémique

Quelles solutions pour surmonter la fatigue pandémique ?

Alors face à ce constat, le gouvernement appelle à “prendre soin de soi” afin d’atténuer les effets de cette fatigue pandémique sur la population. Alors, c’est mignon, surtout après des décennies de négligence et de sous-investissement dans les services de santé mentale. La situation est sur le point de devenir un sérieux problème de santé publique. Il serait vraiment temps que des moyens conséquents soient débloqués pour que les publics vulnérables puissent enfin prendre soin comme il se doit de leur santé mentale. C’est certes un autre sujet mais voyez comment chez moi aussi, la lassitude peut me gagner ! 

Alors, c’est infantilisant aussi, car on aurait pas eu l’idée tout seul…

Mais alors ? Comment “aller mieux” dans ce climat anxiogène ? Même si moi aussi, certains jours, j’aurai bien envie d’aller me terrer au fond d’une grotte, voici quelques éléments de survie.

Admettre qu’il y a un problème


C’est la base. Mais c’est pourtant loin d’être une évidence. Ne perdez jamais de vue qu’il n’y a aucune honte à avoir. Il n’y a pas de culpabilité à avoir si la fatigue pandémique vous a gagné. Vous n’êtes pas “faible”. Vous êtes fragilisé.e.s par la situation. C’est une immense nuance. Il est normal de se sentir déprimé.e, impuissant.e, angoisé.e ou las.se ! Alors, verbalisez vos émotions. Agissez sur vos pensées parasites qui amplifient vos émotions négatives en prenant un peu de distance, en modifiant votre point de vue. Et si besoin, faites vous aider par un.e professionnel.le (là encore, ce n’est pas une honte ou un aveu de faiblesse).

S’efforcer de casser sa routine (tout en gardant un cadre)


Les premiers jours du premier confinement ont été une “lune de miel avec nous-même”: on a retrouvé la joie de cuisiner, bricoler, apprendre, s’écouter… Et puis, les restrictions s’installant dans le temps, un rythme casanier a pu se mettre en place et des mauvaises habitudes routinières se sont ancrées. Pour en prendre conscience, rapportez à l’écrit les grands temps de votre journée. Voyez si les jours se suivent et se ressemblent (un peu trop). Et tâchez alors de réintroduire de nouvelles activités (ou de réintroduire des activités que vous appréciez avant la pandémie). Bref, fixez-vous des petits objectifs (simples et réalisables) pour entretenir votre motivation quotidienne !

casser la routine

Se focaliser sur les choses satisfaisantes


C’est ce que j’appelle également “rééduquer le regard”. Alors oui, c’est le bordel. Et on navigue à vue. Mais nous avons cette tendance primaire à nous centrer sur les insatisfactions, sur ce qui ne va pas. Dit autrement, nous avons une belle propension à nous pourrir la vie. Or, cette attention sélective se fait au détriment d’expériences positives et d’émotions agréables que nous expérimentons pourtant quotidiennement. En relevant chaque jour ce qui vous a fait du bien, ce que vous avez réussi, ce sur quoi vous avez réussi à avancer (ou ne pas reculer), vous prendrez de cours ce biais de sélection négative. Il ne s’agit pas de se projeter dans le monde magique des licornes. Il s’agit de relever ce qui, objectivement, fonctionne pour vous. Et de vous y rapporter lorsque vous aurez un coup de mou.

voir le positif

Sortir du mode “pilote automatique” (et accepter)


J’ai volontairement préféré cet intitulé à “pratiquer la pleine conscience”. Cette terminologie recouvre une pratique  ô combien utile mais malheureusement mal comprise (cela vaudrait un article à lui seul).
Revenons à nos moutons. Pourquoi sortir du mode “pilote automatique” ? Car lorsque l’on souffre ou que l’on est confronté à des sensations désagréables, on a tendance à vouloir vite les glisser sous le tapis. Pourquoi ? Parce que notre culture nous apprend que nous devons maîtriser ce que nous ressentons, ne pas souffrir, être toujours heureux, etc. Mais c’est normal de ressentir des choses ! Soyez donc plus ouvert.e à ce que vous faites, vous vous dites, vous ressentez. Et abandonnez votre lutte contre les sensations désagréables. Préférez-y l’acceptation

Il ne s’agit pas de modifier vos ressentis indésirables. Il s’agit de (re)prendre conscience de ce qui est important pour vous et sur lequel vous avez la main (car, par exemple, au hasard, vous n’avez pas la main sur l’évolution de la pandémie, mais vous avez la main sur la façon dont vous vivez celle-ci). Par ailleurs, un état de présence à soi permet de développer son processus attentionnel, réduit le stress, diminue l’adrénaline (on en a assez comme ça en ce moment), favorise la concentration, fait baisser les ruminations mentales, donc favorise le sommeil… Et par les temps qui courent, ce n’est pas un luxe.

en conscience

Ne pas laisser les choses s’installer

Je vous entends d’ici : “Oui, mais de toute façon, on ne sait pas combien de temps la pandémie va encore durer !” Et bien raison de plus ! Mieux vaut prévenir que guérir. Plus vite vous affronterez le problème, plus vous aurez de chance de vous en libérer sans y laisser de plumes. Cela vous permettra surtout d’éviter un effondrement psychique.

Si vous sentez que la coupe est pleine et que vous ressentez le besoin de vous faire aider, vous pouvez vous tourner vers un spécialiste de l’accompagnement. Il peut s’agir d’un psy* (chologue, thérapeute, chiatre…). Ou, d’une praticienne en thérapie comportementale et cognitive, si vous n’avez pas envie de raconter votre vie et avez plutôt besoin d’un plan d’actions concret et opérationnel pour améliorer votre qualité de vie(en d’autres termes, de travailler sur le “comment” aller mieux plutôt que “pourquoi” ça va mal). Ou d’une sophrologue, pour soulager vos douleurs physiques et vos tensions psychiques.  Bref, j’arrête là sinon on va me soupçonner de prosélytisme. 

Choisissez le mode de thérapie qui vous semble le plus adapté à vos besoins.
Des aides existent pour favoriser l’accès aux soins des personnes les moins aisées financièrement (et pourtant les plus concernées, comme je le disais plus haut). Citons par exemple le chèque psy étudiant, limité, qui a le mérite d’exister… Espérons que des moyens plus conséquents seront développés rapidement afin d’éviter un pétage de plomb global…

fatigue pandémique

Créer un environnement réconfortant 

De manière générale, prenez soin de vous. Première arme : limitez l’exposition aux informations anxiogènes (JT, médias, réseaux sociaux, etc.). Ensuite, profitez de la slow life actuelle pour prendre un bain, vous faire un masque, écouter de la musique, regarder une série, etc. Bref, une activité de détente. Mais gardez aussi de courts moments d’ennui, ça booste la créativité et l’introspection ! Gardez également le contact avec vos proches qu’importe la manière. Riez, échangez, pleurez, râlez, vivez ! Nous sommes des êtres sociaux, nous avons besoin d’être en contact avec nos congénères.  Pour les personnes en télétravail, maintenez un “cadre” de travail avec un espace dédié, des horaires, etc.
Prendre l’air, faire du sport, ou encore s’exposer à la lumière naturelle, sont également des moyens pour décompresser et libérer les tensions accumulées.

Et sinon, comme dans chaque situation de crise, il y a un numéro vert.

prendre soin de soi

Si seulement il y avait un remède miracle …

Ces solutions ne sont bien entendu pas exhaustives et doivent être adaptées à la situation de chacun. Il n’existe pas de remède miracle contre le syndrome de fatigue pandémique. Cette lassitude est tout à fait normale, et tant que la situation sanitaire ne s’améliorera pas, nous devrons y faire face.

L’important reste de ne pas laisser s’installer cette fatigue et ce manque de motivation. Autant que possible, il ne faut pas ruminer. Il ne faut pas se focaliser sur les éléments négatifs, mais plutôt se demander ce que l’on pourrait faire que l’on ne fait pas habituellement. Et comme cela n’est pas toujours évident alors il ne faut pas hésiter à demander un petit coup de pouce, à ses proches, à ses amis, ou à des professionnel.le.s… 

Compte tenu de mes spécialités, j’accompagne les femmes en souffrance, qui auront pu être victime de violences, développé un trouble alimentaire ou rechuté, vécu encore plus douloureusement leur maladie, présenté des troubles anxieux voire un état de stress post-traumatique…Plus généralement, j’accompagne les personnes qui ressentent le besoin de se libérer de leurs angoisses.  Si vous souhaitez savoir en quoi mes accompagnements peuvent aider dans cette drôle de période, je vous invite à consulter mon site.

Et vous, ressentez-vous cette fatigue pandémique ? Quelles sont vos astuces ?

Si vous avez des questions ou si vous souhaitez partager vos ressentis, votre témoignage, n’hésitez pas à me contacter.